Comment les connaissances des étudiants sur la réglementation financière bénéficient des recherches menées à HEC Paris
La recherche académique à HEC Paris joue un rôle crucial dans la conception par l’école de l’enseignement sur la réglementation financière. La capacité des enseignants à s’appuyer en classe sur des exemples issus du monde réel permet aux étudiants d’acquérir des connaissances inestimables – et d’augmenter leurs chances d’épater leurs employeurs.
Ouvrez une édition récente du Financial Times ou du Wall Street Journal : en moyenne, un article sur cinq sera directement lié à la réglementation financière (ou à son durcissement), qu’il s’agisse de l’application de contraintes plus strictes aux banques, à d’autres institutions financières, ou à leurs clients industriels, ou bien de l’adaptation de ces derniers auxdites contraintes. Si on ajoute à cela les nombreux scandales financiers ayant secoué les banques et autres institutions et les milliards de dollars d’amendes qu’ils leur ont coûtés, on comprend que de nombreux employeurs du secteur bancaire et financier souhaitent que leur personnel dispose de connaissances approfondies de ces règles, sans parler du coût de les violer. Et c’est là qu’intervient le module spécialisé en Réglementation financière du Master en Finance de HEC Paris.
Une refonte profonde de la réglementation a suivi la crise financière de 2008. De nombreux employés du secteur financier n’en ont alors pas compris les enjeux et les mécanismes, faute d’avoir étudié le sujet pendant leur cursus. Près de dix ans après, les choses ont changé. « Les gens parlent en permanence de la réglementation financière et si vous voulez participer au débat, briller en entretien, ou simplement bien faire votre travail, il faut en maîtriser les bases » explique Jean-Edouard Colliard, le Professeur assistant qui a conçu le module et l’enseigne.
Il est vital pour Colliard de préparer ses étudiants, dont la majorité se dirige vers une banque d’investissement ou un gestionnaire d’actifs, à l’influence de la réglementation financière sur leurs tâches quotidiennes. Lorsqu’ils arrivent dans son cours, c’est souvent la première fois que les étudiants découvrent le sujet, armés seulement des mots-clés qu’ils ont glanés dans les journaux. « Certains craignent qu’il ne s’agisse que d’une liste de « choses à ne pas faire » - par exemple ne pas prendre trop de risques – mais telle n’est pas du tout l’approche du cours », explique Colliard. « En réalité j’enseigne les raisons pour lesquelles ces réglementations existent à la base, et leur « philosophie » sous-jacente – ce qui aidera les étudiants, une fois actifs, à rester à jour malgré la rapidité des modifications dans ce domaine. »
L’approche est double : positive (vue d’ensemble de la réglementation en place et du processus réglementaire) et normative (discussion de ce que serait une situation optimale). Certains étudiants, plus cyniques, voient la réglementation comme une contrainte pour leur future activité, tandis que d’autres considèrent que l’industrie financière est marquée par les excès et défendent un système de contrôle. Cependant, précise Colliard, il ressort de la recherche que rien n’est tout noir ou tout blanc : si l’existence de défaillances de marché (en laissant les agents totalement libres, on n’obtient pas le meilleur résultat possible) n’est plus remise en doute, il existe également des défaillances réglementaires. « C’est pourquoi j’essaye d’équiper les étudiants avec des outils leur permettant de comprendre ce que signifie une « bonne » ou « mauvaise » réglementation, et comment le mesurer », explique-t-il.
Afin d’être toujours à jour, l’universitaire utilise largement les articles de recherche récents publiés partout dans le monde, en ce compris les siens propres et ceux de plusieurs collègues de HEC également actifs dans le champ. HEC Paris travaille en étroite collaboration avec les autorités réglementaires françaises (Banque de France, ACPR, AMF), ce qui permet aux chercheurs comme Colliard d’avoir accès à des données confidentielles et d’échanger régulièrement avec des praticiens. Du grain à moudre pour parler aux étudiants du nombre d’inspections réalisées par les régulateurs, de l’importance (ou non) du lobbying dans l’élaboration de la réglementation, des gagnants et perdants de la réglementation, de l’adaptation des entreprises à celle-ci, ou de son influence sur leurs coûts de financement. « Notre savoir provient d’articles extrêmement récents, ce qui est très important pour l’enseignement » précise le professeur, qui mobilise d’ailleurs aussi sa propre recherche, comme dans les trois exemples ci-dessous.
La réglementation est extrêmement complexe ; un axe de recherche de Colliard est d’étudier si elle est ou non trop sophistiquée, et de mesurer les avantages et inconvénients de cette complexité. Certains de ses étudiants s’attaquent de front à cette complexité, convaincus que lire les trois accords de Bâle, dont le dernier comprend plus de 600 pages, les rendra plus calés. Mais Colliard a une autre opinion : « Pour moi ça n’a pas de sens, d’autant que dans quelques années nous aurons un texte différent avec Bâle 4 ». Plutôt que d’enseigner toutes les différentes règles, il se concentre donc sur la logique économique qui les sous-tend. En explorant les raisons derrière certaines règles et leurs objectifs, il donne aux étudiants de HEC une compréhension de l’architecture réglementaire au niveau international. Ce qui équivaut à de la connaissance de long terme : « Les problèmes que la réglementation tente de résoudre ne vont pas disparaître du jour au lendemain et seront toujours là, sous une forme ou sous une autre » explique Colliard.
Un autre sujet de recherche majeur que Colliard importe directement dans son cours est la supervision bancaire. Il cite par exemple le gros problème d’une course au nivellement par le bas entre les régulateurs nationaux pour attirer plus d’activité. « Malheureusement, si tout le monde fait ça, aucune banque n’est régulée correctement ; il est important que les pays développés se mettent d’accord sur un ensemble de règles que tout le monde applique », explique-t-il. Ensuite, une fois que les réglementations sont fixées, le rôle des superviseurs est de faire en sorte qu’elles soient respectées. Cependant, les superviseurs ont également des incitations à être « trop indulgents envers les banques », complète le chercheur, car ils subissent une pression pour favoriser les banques domestiques et les placer dans une meilleure position pour concurrencer leurs homologues étrangers – ce qui, partant, appelle à de nouveaux mécanismes pour superviser les superviseurs.
Un troisième champ d’intérêt de Colliard est la régulation du risque systémique, qu’il décrit comme un enjeu très important tant pour les grandes banques que pour les régulateurs. Dans l’article qu’il a co-écrit sur le risque systémique, il souligne avec ses coauteurs le décalage entre la réglementation et l’état actuel des connaissances : notamment, alors que la recherche a montré depuis longtemps que les petites banques peuvent être systémiques du fait de leur interconnexion ou d’autres caractéristiques, la réglementation continue à se concentrer largement sur la seule taille. « Si on prend une banque qui n’est pas très grosse, sa place dans le réseau et le financement qu’elle accorde à d’autres banques peuvent très bien influer sur la gravité de sa défaillance pour l’ensemble du système ».
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HEC Paris Masters in Finance Ranked number 1 worlwide by the Financial Times
Biographie de Jean-Edouard Colliard