Alice Magand

Notre responsabilité auprès des plus vulnérables est collective.

Alice a commencé sa carrière dans le génie civil, en dirigeant des équipes sur le terrain pour des projets d'eau et d'infrastructures. En tant qu'ingénieure, elle a travaillé dans de nombreux pays, de la Jamaïque au Royaume-Uni, en collaboration avec des partenaires publics et privés de plus de 30 nationalités.

Cherchant à avoir plus d'impact dans sa vie professionnelle, Alice a rejoint le programme On Purpose Associate, au cours duquel elle a eu l'occasion de travailler pour Phitrust Partenaires, un fonds d'investissement à impact social et Innovafeed, une start-up de biotechnologie. Convaincue que le changement à échelle doit se faire au sein et par le biais du secteur privé, Alice a décidé de rejoindre Hystra en 2018 en tant que consultante senior.

Hystra est un cabinet de conseil hybride qui travaille avec des pionniers du monde des affaires et du secteur social pour concevoir et mettre en œuvre des stratégies hybrides et des approches business innovantes qui soient rentables, aussi bien pour éradiquer les problèmes sociaux et environnementaux que pour combiner les idées et les ressources des entreprises et des citoyens. Depuis qu'elle a rejoint Hystra, Alice s'est efforcée de favoriser le déploiement d'entreprises inclusives dans le secteur privé, en soutenant à la fois des partenariats public-privé et des multinationales, notamment dans les domaines de la distribution du « dernier kilomètre » et de l'accès à la nutrition.

Elle enseigne dans le Certificat « Inclusive and Social Business » depuis 2019.

En cette période très particulière de la crise Covid-19, nous lui avons posé quelques questions sur son activité, et sa vision d’un avenir favorable à une économie plus inclusive.

EN CETTE PÉRIODE OÙ LES PERSONNES LES PLUS VULNÉRABLES SOUFFRENT LE PLUS, QUELLE DEVRAIT ÊTRE, SELON VOUS, LA PRIORITÉ DES GOUVERNEMENTS OU DES ENTREPRISES (EN FRANCE OU DANS LE MONDE)? 

Nous croyons fermement que chacun, en tant qu'individu, entreprise ou gouvernement, doit faire ce qu'il peut à son niveau. Pour les entreprises, cela signifie réfléchir à la manière dont elles peuvent servir au mieux leurs clients en ces temps compliqués. La responsabilité envers les plus vulnérables est collective. Certaines entreprises sociales ont complètement cessé leurs activités pendant la crise ; certaines n'avaient vraiment pas le choix, mais d'autres ont été paralysées (comme beaucoup d'autres entreprises sociales !) par la peur de l'inconnu. D'autres entreprises sociales ont réussi à réinventer leur modèle économique pour garantir un service à leurs clients. Par exemple, Ecofiltro, une entreprise sociale qui vend des filtres à eau au Guatemala, a réussi à mettre en place une plateforme en ligne et un système de livraison à domicile le jour même en quelques jours seulement. Cette réactivité a permis à Ecofiltro d’avoir leur meilleur mois en termes de ventes, et l’entreprise a fourni à ses clients un accès à l'eau potable alors même que tous les magasins étaient fermés.

SELON VOUS, POURQUOI ET COMMENT L’ÉCONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE EST-ELLE UNE RÉPONSE À L'UN DES DÉFIS DE NOTRE TEMPS ET POURRAIT-ELLE CONTRIBUER AU "MONDE D'APRÈS"?

Plus que jamais, il y a besoin de modèles au service de ceux qui en ont le plus besoin. La crise nous montre qu'il est essentiel de disposer d'un modèle résilient pour la surmonter. Un moyen est de diversifier volontairement ses activités pour atteindre différents segments de clientèle (par exemple : différents niveaux de revenus, urbain et rural...). Cette diversité devrait être fondée sur une logique commerciale, mais elle peut aussi permettre de n’oublier personne dans l’accession à des produits qui améliorent la qualité de vie. Par exemple, les distributeurs de produits solaires ont observé une augmentation des ventes de SHS (Solar Home Systems – installations solaire domestique) et d'appareils dans les zones rurales pendant le Covid-19, alors que les gens retournaient dans les villages - et une fois de plus, certaines de ces entreprises ont réalisé leur meilleur mois pendant la période de fermeture. Le fait de ne servir que les marchés urbains ne leur aurait très probablement pas permis d'obtenir de tels résultats.

COMMENT VOTRE TRAVAIL CONTRIBUE-T-IL À LA CRÉATION D'UNE ÉCONOMIE PLUS INCLUSIVE ET AUX SOLUTIONS À LA CRISE ACTUELLE?

Hystra travaille avec des investisseurs sociaux, des entrepreneurs sociaux et des multinationales pour aider à lancer et à développer des entreprises inclusives.  Depuis le début de la crise, nous avons travaillé avec tous nos clients, en particulier avec ceux qui sont en première ligne de cette crise, pour les aider à explorer comment poursuivre leurs activités ou comment adapter leur modèle tout en assurant la sécurité de leurs employés. Par exemple, pour MERIEM, nous avons aidé Bara Musso, une entreprise sociale qui vend des aliments nutritifs au Mali, à développer un service de livraison à domicile.

Nous organisons également des webinaires pour assurer le partage des connaissances entre les entreprises sociales. Le premier, intitulé « Resilience for Inclusive Businesses – Early Insights from Practitioners » ( "Résilience pour les entreprises inclusives - les premières impressions des praticiens") a eu lieu le 9 avril 2020.
Enfin, nous faisons de notre mieux pour contribuer à la mise en place d'un écosystème de soutien aux entreprises sociales. Nous avons notamment travaillé avec nos partenaires au sein du Global Distributors Collective, afin d'influencer la conception des fonds Covid-19 pour soutenir les petits distributeurs de produits bénéfiques du « dernier kilomètre ».

QUELS CONSEILS DONNERIEZ-VOUS AUX ÉTUDIANTS EN SCIENCES SOCIALES, AUX JEUNES ENTREPRENEURS OU AUX INTRAPRENEURS QUI SOUHAITENT AVOIR UN IMPACT ET CONTRIBUER À LA TRANSFORMATION DES ENTREPRISES?

L'efficacité et l'efficience sont essentielles en ces périodes : nous n'avons pas le temps de réinventer la roue, nous devrions plutôt apprendre de ce qui fonctionne, nous adapter et nous améliorer, et reproduire ce qui marche. Nous avons été très heureux d'observer une ouverture plus grande que jamais dans le secteur des entreprises sociales, les entrepreneurs étant de plus en plus disposés à partager non seulement leurs succès, mais aussi leurs échecs - aidant ainsi les autres à apprendre et à réussir plus rapidement. Nous ne pouvons qu'espérer que cette tendance se poursuivra une fois que le Covid-19 aura disparu.

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