Intelligence Artificielle : entre régulation et enjeux sociétaux
Depuis un an, l’accès aux IA génératives continue d’ébranler le quotidien des professionnels et des particuliers. Un sujet mis sur le devant de la scène dès 2023, qui nécessitait une réponse forte de la part du gouvernement. C’est chose faite avec le lancement du Comité de l'Intelligence Artificielle Générative, qui représente une étape cruciale dans la gestion de l'intelligence artificielle (IA) en France. À l’origine de ce comité, la Première Ministre Elisabeth Borne, qui a officiellement annoncé l’installation du comité le 19 septembre dernier. Dans le cadre de cette annonce, nous avons interviewé François Cazals, expert en la matière, Professeur affilié à HEC Paris Executive Education et co-auteur de l’ouvrage Intelligence artificielle : L’intelligence amplifiée par la technologie, pour recueillir ses perspectives sur les défis réglementaires et sociétaux liés à l'IA.
Se donner les moyens de notre liberté
Le constat était sans appel. L'Europe n'est pas parvenue à se faire une place de choix dans la révolution numérique. A trop vouloir réguler, nous avons négligé la conquête technologique. C’est ce que déplore Bruno Le Maire, ministre de l'Economie, des Finances, de la Souveraineté Industrielle et numérique. "Nous achetons aujourd'hui des millions d'Iphone et dépendons massivement de logiciels américains. L'Europe a échoué à construire des géants mondiaux du numérique, à de rares exceptions près. L'ère du numérique se fait aujourd'hui globalement sans l'Europe et l'Europe se construit trop souvent contre le numérique."
Pour ne pas reproduire cette même situation, le gouvernement a tout récemment initié le comité de l'intelligence artificielle générative. Lumière sur sa principale mission.
Lancement du premier comité de l'intelligence artificielle générative en France
Avec ce comité, la France ambitionne de maîtriser la technologie pour maîtriser la norme, afin d’éviter de subir la norme des autres puissances.
L’installation du comité contribuera ainsi à faire de la France un pays à la pointe de la révolution de l'intelligence artificielle, et à éclairer les décisions du Gouvernement sur trois points cruciaux :
- Renforcer nos formations pour développer davantage de talents en France ;
- Investir pour favoriser l’innovation française sur la scène internationale ;
- Définir une régulation adaptée des différents secteurs pour protéger des dérives.
Le délicat équilibre entre régulation et fluidité
Lors de notre entretien, François Cazals souligne les différences de perspective entre l'Europe et les États-Unis concernant la régulation de l'IA et la data. Alors que l'Europe tend à encadrer rigoureusement ce secteur, les États-Unis adoptent une approche plus fluide. Selon lui, il n'y a pas de point d'équilibre, mais plutôt un choix binaire entre régulation et absence de régulation. Il exprime sa confiance dans la régulation européenne actuelle, soulignant le besoin croissant de protéger la souveraineté nationale, notamment dans des domaines tels que la défense et l'industrie.
IA et données : Entre régulation minimale et enjeux souverains
Concernant l'utilisation des données et l'IA, François Cazals prévoit une régulation minimale pour certaines applications tout en soulignant l'absence de régulation sur les sujets souverains. Il met en garde contre le risque de se retrouver face à une Europe régulatrice mais relativement absente de l'innovation technologique.
Le duopole sino-américain se livre une guerre sans merci pour le leadership mondial dans les dimensions stratégiques. Dans ce cadre, la technologie est une composante importante, presque à l'égal de la puissance militaire : il s’agit là d’un attribut de la souveraineté.
Réflexions sur les enjeux sociétaux
Abordant les préoccupations sociales, François Cazals met en avant la nécessité d'intégrer ces technologies tout en évitant des écarts sociaux trop importants. Il souligne le risque d’aborder le sujet à l'envers en se concentrant sur la technologie plutôt que sur les besoins humains et organisationnels. Il plaide pour une utilisation des technologies d'IA dans une logique d'amplification et de performance plutôt que de substitution.
Un message sans complaisance aux cadres face à l'IA
Interrogé sur le message qu'il souhaiterait adresser aux cadres d’entreprises qui peuvent se sentir dépassés par l'IA, François Cazals évite la complaisance. Il rappelle que nous sommes au début d'une révolution similaire à celle du début d'Internet. Plutôt que de céder à la peur, l’expert encourage à comprendre, former, et tester progressivement des cas d'usage simples. Il insiste sur l'importance de construire une confiance progressive avant d'aborder des sujets plus complexes.
Merci à François Cazals pour son éclairage sur ce sujet marketing. Vous souhaitez développer une approche globale de la Data Science et de l’Intelligence Artificielle pour leurs équipes et leur entreprise ? Notre programme court Data & AI for Business est fait pour vous.