Neurobus, l'IA Frugale au Service de la Défense et du Spatial
Allier Deep Tech et durabilité, c’est le pari gagnant de Neurobus, une startup innovante fondée par Florian Corgnou, un entrepreneur dont les passages successifs à HEC Paris ont grandement impacté la trajectoire de Neurobus.

L’aérospatial, un secteur de coeur
D'abord prédestiné à une carrière d'ingénieur dans l’aéronautique, Florian voit peu à peu son parcours s’orienter vers l’entrepreneuriat et le monde des affaires, notamment à la suite d’un passage marquant aux États-Unis. Ensuite sa volonté de se diriger vers les technologies de pointe le pousse à une première expérience chez Tesla à son siège européen aux Pays-Bas. Bien que cette expérience ait été formatrice et inspirante, Florian opère un revirement à 360 degrés.
L’ingénieur se détourne en effet de son secteur de prédilection pour devenir entrepreneur, et qui plus est… dans la finance ! Avec sa startup Trezy, les dirigeants de PME pouvaient connaître la situation financière de leur entreprise en temps réel. Une expérience réussie puisque la société parviendra à lever 3,5 millions d’euros et perdure encore aujourd'hui. Mais malgré le succès de Trezy, Florian ressent le besoin de s'investir dans un projet avec plus de sens, et dans un domaine qui le passionne véritablement. Il revient alors vers ce qui le fait réellement vibrer : l’aérospatial.
C’est là qu’il rejoint un programme d'entrepreneuriat spatial en partenariat avec Airbus Defense & Space, et que l’idée de Neurobus germe.
Neurobus, une solution qui combine sobriété énergétique et intelligence
C’est en observant les avancées technologiques chez Tesla et SpaceX, puis en intégrant le programme avec Airbus Defense Space, que Florian est parvenu à poser les bases de Neurobus. L’immersion auprès d'ingénieurs et d'experts du spatial lui a permis d'identifier les tendances du marché et les besoins non satisfaits du secteur. Des besoins que Neurobus se voulaient de combler…
Que propose Neurobus ? Une Intelligence Artificielle frugale embarquée, c’est-à-dire une IA conçue pour consommer très peu d'énergie et intégrée directement au sein des systèmes qui l’hébergent, tels que des drones ou des satellites. Le traitement des données s'effectue localement, évitant ainsi le transfert coûteux en énergie vers des data centers.
Le point de départ de Neurobus se situe donc dans le secteur spatial, un domaine intrinsèquement lié à la défense avec des partenaires tels que Airbus Defense and Space, l'Agence Spatiale Européenne ou encore l'Agence Spatiale Française. Cependant, l'entreprise a su adapter sa technologie prometteuse au secteur des drones, un marché en pleine expansion avec des besoins plus immédiats. D’ailleurs, la victoire d'un concours d'innovation européen de la défense a confirmé le potentiel de cette solution pour la détection de drones.
Le cœur de l'innovation de Neurobus réside dans son approche inspirée de la biologie humaine, le système neuromorphique, à savoir une technologie de rupture qui s'inspire du fonctionnement du cerveau humain et de la rétine pour concevoir des processeurs et des capteurs extrêmement efficaces en termes de consommation d'énergie. Le cerveau humain est pour Florian une source d'inspiration inégalée :
« Le cerveau, c'est aujourd'hui un des meilleurs ordinateur qui existe parce que c'est énormément de puissance de calcul, avec une consommation d'énergie très faible. »
Les drones : un champ d’application testé et validé
Neurobus ne se concentre pas sur la fabrication des composants (processeurs et capteurs), un domaine qui requiert des investissements massifs. Sa valeur ajoutée se situe au niveau de l'assemblage de ces composants et du développement des couches logicielles spécifiques aux besoins des industriels. La startup se positionne ainsi comme un intégrateur et un éditeur de logiciels, facilitant l'adoption de cette technologie de pointe.
« Neurobus se positionne exactement entre le fabricant et l'industriel. Nous ne fabriquons pas le hardware, mais on va l’assembler dans un produit qui va répondre spécifiquement aux besoins de nos clients, et développer les couches logicielles qui vont répondre aux applications spécifiques de cet industriel », précise Florian Corgnou.
Bien que l'aérospatial reste un axe stratégique pour Neurobus, l'application concrète de sa technologie dans le secteur des drones ouvre des perspectives fascinantes en matière d'autonomie. Les drones équipés de l'IA frugale de Neurobus peuvent effectuer des missions de manière plus autonome, prenant des décisions en temps réel avec une intervention humaine limitée. Bien que la validation humaine reste primordiale pour les actions stratégiques, certains aspects comme la surveillance de zones peuvent être gérés en toute autonomie.
A titre d’exemple, un drone va pouvoir éviter de façon autonome un objet qui arrive à toute vitesse sur lui. En revanche, lorsqu'il s'agit de se diriger vers une cible, le drone aura besoin d’une validation humaine avant d’effectuer cette action.
Si l'application actuelle se concentre principalement sur la défense en raison du contexte géopolitique et des besoins urgents, Neurobus envisage également un avenir dans le civil, notamment pour des applications comme la livraison de colis par drones autonomes.
Surmonter les challenges, pas à pas
Comme toute aventure entrepreneuriale, celle de Neurobus n'a pas été exempte de défis. Et les challenges, c’est ce qui anime Florian ! Néanmoins, selon lui, « le plus gros challenge, c'était de parvenir à trouver notre marché dans le temps imparti, à savoir selon le cash disponible. » Donc, deux problèmes en un.
En effet, cibler le marché le plus pertinent pour une technologie de rupture n’a pas été sans peine. Après avoir exploré les secteurs de l'automobile et du spatial, qui ont tout deux des temps d’intégration longs, Neurobus a trouvé dans les drones un terrain d'application idéal. Du côté des finances, Florian admet qu’il s’agit là d’un enjeu constant pour les startups. « Les capacités financières, c’est le nerf de la guerre et c’est une problématique de fond parce qu’en tant que startup, on est dans cet état de survie permanent », précise Florian.
Néanmoins, Neurobus se démarque par sa stratégie de financement initiale. Plutôt que de se lancer dans une levée de fonds en tentant de convaincre des investisseurs de miser sur une technologie de rupture inconnue, Florian a privilégié la sécurisation de contrats de R&D avec des clients. « Comme j'avais déjà obtenu une validation institutionnelle et industrielle dans mes expériences précédentes, j’ai fait en sorte que les clients puissent financer la partie R&D, et de me faire guider pour trouver les bonnes applications. »
Enfin, une autre difficulté, inhérente cette fois-ci aux technologies de rupture, est l'étendue de leur champ d’application. Pour Florian, la discipline est capitale car souvent dans la Deep Tech, on peut s'y perdre... « Tout le monde le sait, et pourtant on tombe tous dans le piège, moi le premier ! » La technologie est partout, et en tant qu’entrepreneur, il est naturel de vouloir tout explorer. Selon lui, le vrai défi réside dans la capacité à trouver le champ d'application où la technologie aura le maximum de valeur business et de valeur technologique. Pour cela, « il faut savoir se concentrer et maitriser un premier cas d’usage, bien le faire et ne surtout pas s’éparpiller », conseille Florian.
Cette stratégie s'avère payante, avec un chiffre d'affaires de contrats de R&D atteignant environ 600 000 € en 2024, sans compter les subventions publiques. L'équipe, composée de deux associés et trois employés, s'apprête également à s'agrandir avec le recrutement de quatre nouvelles personnes d'ici juin, portant l'effectif à une dizaine de collaborateurs.
Fort de cette traction et d'une feuille de route bien rodée, Neurobus prépare une levée de fonds ambitieuse, estimée entre 5 et 10 millions d'euros, d'ici la fin de l'année pour entamer la phase conceptuelle, à savoir créer le produit avec tous les retours de ses clients.
HEC Paris, le fil rouge de l’aventure Neurobus
Neurobus serait-elle ce qu’elle est aujourd’hui sans les passages de Florian à HEC Paris ? Peut-être pas. Alors qu’il lance Neurobus, Florian rejoint en parallèle l’Executive Master of Science in Innovation & Entrepreneurship (EMSIE) d’HEC Paris pour « s’entourer et bénéficier d’un soutien supplémentaire », comme il l’affirme. Cette expérience, complétée par l’intégration de Neurobus à deux programmes d'accompagnement de l'Institut Innovation & Entrepreneuriat d’HEC Paris, l'Incubateur HEC et le Creative Destruction Lab (CDL) - Paris, lui a fourni un cadre et des conseils stratégiques qui ont façonné la trajectoire de Neurobus. En parallèle, le programme Challenge+ a également aidé l’équipe à développer d’autres compétences.
Les mentors de ces programmes ont aidé Florian à challenger les orientations de l'entreprise et à affiner sa stratégie. Il s’explique : « les équipes de l’Incubateur nous ont apporté un vrai soutien pour finaliser les contrats avec nos clients, qui étaient très compliqués, et nous avons reçu énormément d’aide de la part des mentors du CDL, qui nous ont challengés sur tous les défis évoqués précédemment. Ces avis externes bienveillants nous ont clairement permis de nous poser les bonnes questions et de pouvoir réduire la chance de faire des erreurs. »
Pour conclure, au tour de Florian de partager des conseils avec des aspirants entrepreneurs, particulièrement dans la Deep Tech :
- Validez votre idée auprès des clients avant de chercher des financements. Selon lui, trouver un client – un champion qui deviendra votre ambassadeur en interne – prêt à payer pour le développement d'une technologie est la meilleure validation possible.
- Développez une véritable ‘customer obsession’ pour comprendre profondément les besoins de vos clients et savoir s’ils sont prêts à payer pour votre solution avant de vous pencher dessus.
Des conseils éprouvés par Florian et qui ont fait leur preuve pour Neurobus, dont nous ne manquerons pas de suivre les avancées.