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Depuis une dizaine d'années, la question de la raison d'être des entreprises a une place centrale dans les débats économiques et sociaux. En France, la loi Pacte et la création des sociétés à mission ont placé cette thématique au premier plan. Et pourtant ! « En moyenne, 80% des employés ne connaissent pas la raison d'être de leur entreprise, ils ne sont pas capables de la reformuler », explique Rodolphe Durand, Professeur en stratégie d'entreprise à HEC Paris, titulaire de la chaire Joly Family Chair in Purposeful Leadership et fondateur de l'Institut Society and Organizations à HEC Paris.

Un homme en costume parle derrière un pupitre avec un micro, lors d’un événement professionnel. Une femme se tient à sa gauche, légèrement en retrait. En arrière-plan, un panneau indique "Purpose Day".

C’est dans ce contexte que le Professeur Durand a récemment présenté une Masterclass abordant les différentes facettes de la raison d'être et son impact sur la performance des entreprises. Explorons la notion de raison d'être et comment l'incarner à tous les niveaux de l'entreprise pour améliorer la performance.

 

La raison d'être : une notion universelle, des méthodes de formulation hétérogènes


La raison d'être d'une entreprise correspond à sa mission fondamentale, au-delà de la simple quête de profit. Elle définit en effet le rôle de l'entreprise dans la société et ses objectifs non financiers. Pour Rodolphe Durand, « la raison d'être peut se définir par le pourquoi, la raison profonde d'existence d'une organisation, au-delà de sa performance financière ». Si tous s’accordent sur sa définition, la façon dont on la formule peut se révéler complexe pour les entreprises, d’autant que les méthodes – et leurs chances de réussite – varient. Rodolphe recense quatre approches pour formuler la raison d’être d’une entreprise, dont certaines sont à privilégier.
 

  • La démarche interne, la plus humaine selon Rodolphe Durand. Cette méthode mobilise les équipes sur le terrain pour qu’elles soient parties prenantes de la définition de la raison d'être de l’entreprise. Cela peut inclure des ateliers et des séminaires, et ne nécessite pas l’utilisation d’outils technologiques externes. « Je me souviens avoir vu un distributeur spécialisé qui était présent dans 17 pays, et qui a fait travailler ces 17 pays pour venir avec des éléments de raison d'être », se rappelle Rodolphe Durand.

 

  • La démarche technologique. Ici, l’entreprise recueille – toujours lors d’ateliers – des verbatims, mots clés et retours d’expériences, qui seront ensuite analysés par des outils de Natural Language Processing. Ces outils permettent alors d’identifier les thèmes récurrents parmi les commentaires des parties prenantes.

 

  • Les cabinets spécialisés. Des consultants sondent les clients, les fournisseurs et les réseaux sociaux pour recueillir des données pertinentes et comprendre ce qui se dit sur l'entreprise.

 

  • Les agences de communication. Cette approche, critiquée par Rodolphe Durand, car elle n’implique pas le personnel de l'entreprise, implique une collaboration avec une agence et quelques membres du ComEx. Le risque de cette méthode ? Créer une rupture entre le discours officiel et la réalité quotidienne des employés. 


Selon le Professeur Durand, « si on veut s'engager dans une démarche de raison d'être, il faut aller sonder son corps social, que ce soit de façon organique et/ou de façon technologique, avec une aide extérieure ou pas. »


À l’instar de la formulation de la raison d’être, son implémentation est tout aussi complexe. Pourquoi ? Parce qu’il s’agit là d’un processus soumis à des variations d'adhésion en fonction des niveaux hiérarchiques. Les études académiques, autant que celles des praticiens ou des consultants, montrent toutes que la perception de la raison d'être s’affaiblit à mesure que l'on descend dans l'organigramme.

 

« Les top managers sont capables de formuler la raison d'être et ses différentes dimensions, et de faire – de façon rhétorique et narrative – le lien supposé avec la performance », précise Rodolphe.

 

Mais souvent, les personnes qui sont en contact direct du client voient cela comme étant un concept assez détaché et peu connecté avec leur territoire et leurs outils. 


Les dangers d'une raison d'être mal incarnée


« Énoncer la raison d'être sans que cela coïncide avec les pratiques de management, ça crée un hiatus », insiste le Professeur Durand. Pour que la raison d'être soit authentique et enracinée dans la culture organisationnelle, celle-ci doit s'intégrer dans les méthodes managériales. Sa crédibilité repose donc sur sa cohérence avec les actions des managers et des employés à tous les niveaux. Un décalage entre la raison d'être proclamée et les pratiques peut entraîner une perte de crédibilité, générer du cynisme et démotiver les équipes intermédiaires et opérationnelles.


De même, le degré d’adhésion à la raison d’être comporte un impact non négligeable. « Vous pouvez avoir des équipes qui sont complètement imprégnées de cette raison d'être, et d'autres qui ne le sont pas du tout », précise Rodolphe. Ce manque d'homogénéité peut engendrer des comparaisons sociales, des sentiments de rancœur et des inégalités, qui réduisent inévitablement les bénéfices potentiels de la raison d'être sur la performance.

 

« On estime que l’écart entre les adhésions représente 30% de la déperdition des avantages en performance que vous pourriez atteindre lorsque cette variance est trop grande. » confirme Rodolphe.

 


Plus grave encore, si vous énoncez une raison d'être très généreuse, mais qui n’est pas suivie d’effets dans la pratique, cela peut conduire à des réactions négatives… Et même aller jusqu'au sabotage, particulièrement chez les managers intermédiaires soumis à des pressions contradictoires. 


Impact sur la performance économique


Le lien entre la raison d'être et la performance économique n'est pas toujours évident. « Les études académiques montrent que l'effet moyen d'une entreprise qui a une raison d'être sur la performance économique est nul », précise Rodolphe Durand. Pourquoi ?

 

« Parce que vous avez énormément d'entreprises qui ont une raison d'être et qui arrivent à surperformer. Et vous en avez autant qui ont une raison d'être, mais qui l'utilisent de façon rhétorique, qui ne l’intègrent pas dans les pratiques, et qui ne surperforment pas. » expose Rodolphe Durand.

 

Plusieurs facteurs peuvent également expliquer ce résultat, tels que la diversité des pratiques de mise en œuvre et la variabilité dans l'adhésion à la raison d'être et l’engagement des équipes au sein de l'entreprise. 


Cependant, la raison d’être peut améliorer l'engagement, l’alignement des valeurs, la cohésion et la satisfaction des employés, ce qui, directement ou indirectement, contribue à la réussite globale de l'entreprise. En effet, sous certaines conditions, les impacts financiers et non financiers peuvent être démultipliés. Tout dépend de la manière dont la raison d’être est intégrée, incarnée et homogénéisée au sein de l’entreprise. Pour ce faire, l’organisation peut se reposer sur le ‘Purposeful Leadership’, qui consiste à déployer un leadership ancré dans une raison d’être qui libère l’action collective de l’entreprise, et qui contribue à créer un avantage concurrentiel.


Le ‘Purposeful Leadership’ pour aligner raison d'être et performance  


Le concept de Purposeful Leadership se trouve au cœur de la recherche de Rodolphe Durand depuis plusieurs années. Sa méthode de Purposeful-based Leadership repose sur l’alliance entre la raison d'être et la performance des entreprises, et plus précisément sur le passage de la stratégie à l’impact. À la question ‘comment aligner raison d’être et performance de façon tangible ?’, on retrouve les principes d’incarnation des valeurs, d’autonomie, de culture du Feedback, de reconnaissance… mais pas seulement affirme Rodolphe Durand. La raison d’être nécessite une incarnation particulière, qui repose sur sept leviers : 


Coordination. La coordination est le premier levier pour accomplir collectivement des missions qui façonneront le futur de l’entreprise et de la société.


Legitimacy, Autonomy et Resources. Légitimité, autonomie et ressources sont des boosters de la performance opérationnelle qui incitent les équipes à s'approprier les sujets, à faire preuve de discernement et à libérer des solutions pour expérimenter. 


Innovation et Trust. L’innovation et la confiance permettent d’embrasser la différence, de favoriser l’audace de penser et d’agir différemment, tout en restant à l’écoute des clients.


You. Vous : chaque collaborateur est au centre du modèle qui les pousse à oser et à apprendre continuellement. 


Cette méthodologie Rodolphe Durand la développe et la concrétise auprès de membres de Conseils d’administration ou de Conseils de surveillance, membres de ComEx, ainsi que Directeurs RH et Directeurs formation/développement des cadres dirigeants, qui sont à la recherche de performance organisationnelle


Pour apprendre à embrasser le Purposeful Leadership, découvrez le programme ‘Aligner raison d’être et performance de l’entreprise’, animé par Rodolphe Durand, vous serez en mesure de transformer chaque levier d’impact en actions concrètes et d’établir un plan d’actions immédiat et adapté à votre entreprise. 


Rendez-vous le 7 novembre prochain pour deux jours de formation ‘to make purpose tangible and inspirational’ avec la participation de Hubert Joly, ancien DG de Best Buy et cofondateur de la Endowed Chairs Joly Family d’HEC Paris accompagné de Antoine Frérot, président-directeur général de Veolia.