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L'école

Des chercheurs d’HEC Paris et de l’Université Goethe de Francfort observent qu’ajouter une touche humaine aux conseils financiers délivrés par l’IA les rend plus persuasifs

Des chercheurs d’HEC Paris et de l’Université Goethe de Francfort observent qu’ajouter une touche humaine aux conseils financiers délivrés par l’IA les rend plus persuasifs

Alors que l’intelligence artificielle transforme en profondeur le secteur des services financiers, une nouvelle étude suggère que combiner l’expertise humaine avec les services pilotés par l’IA pourrait significativement améliorer les décisions d’investissement, en offrant un plus grand confort décisionnel grâce à la présence humaine.

Dans le cadre d’expériences menées à la fois sur le terrain et en ligne, en collaboration avec l’une des plus grandes caisses d’épargne d’Allemagne, Cathy Liu Yang et Xitong Li, professeurs-chercheurs à HEC Paris et Kevin Bauer et Oliver Hinz de l’Université Goethe ont analysé l’impact de l’implication humaine dans des services financiers assistés par l’IA, à la fois en amont (production du service) et en aval (décision des consommateurs). Ils ont découvert que, comparé à un conseil financier 100 % automatisé, le rôle de l’humain en tant que médiateur ne nuit pas à la qualité des recommandations de l’IA, tout en renforçant l’adhésion des clients aux conseils prodigués.

Intitulée « My Advisor, Her AI and Me: Evidence from a Field Experiment on Human-AI Collaboration and Investment Decisions », l’étude a analysé les décisions réelles de 137 clients bancaires dans le cadre de prêts personnels. Les résultats montrent que les clients ayant reçu des conseils issus d’une collaboration humain-IA ont davantage suivi les recommandations, notamment dans les situations à haut risque, ce qui a conduit à de meilleurs rendements financiers.

L’étude combine une expérimentation de terrain avec une expérimentation en ligne contrôlée, afin d’examiner à la fois les mécanismes de production et de réception des conseils en investissement collaboratifs entre humains et IA.

Les chercheurs ont constaté que les clients étaient bien plus susceptibles de suivre les recommandations lorsque celles-ci émanaient d’une collaboration entre un conseiller humain et une IA, plutôt que d’une IA seule — notamment dans les cas les plus risqués. Il en résulte une augmentation de 15,5 points de pourcentage dans la concordance entre les décisions des clients et les conseils reçus, accompagnée de meilleurs rendements financiers. Ce gain ne s’explique pas par une perception accrue de la qualité des conseils, mais par le sentiment de sécurité émotionnelle qu’apporte la présence humaine. 

« Contrairement aux craintes selon lesquelles l’intervention humaine pourrait réduire l’efficacité de l’IA, nos recherches montrent qu’impliquer un conseiller humain ne diminue pas la qualité du conseil – cela renforce au contraire son pouvoir de persuasion, principalement par la confiance émotionnelle qu’il inspire », explique l’autrice principale Cathy Yang (HEC Paris).

Une analyse plus fine révèle que cette confiance émotionnelle est essentielle dans des contextes d’incertitude décisionnelle. Ce n’est donc pas la complémentarité homme-machine qui améliore la qualité perçue du conseil, mais bien le réconfort émotionnel qu’apporte l’humain.

« Dans des situations incertaines, les individus recherchent du réconfort émotionnel – ce que l’IA seule ne peut leur offrir », ajoute le professeur Xitong Li (HEC Paris).

Ces résultats arrivent à un moment charnière, alors que les régulateurs – notamment en Europe – débattent du niveau de supervision humaine nécessaire dans les services pilotés par l’IA. L’étude plaide en faveur d’une approche centrée sur le consommateur, recommandant des politiques favorisant une collaboration humain-IA efficace afin de protéger les consommateurs tout en améliorant les résultats financiers.

« Cette recherche livre des enseignements cruciaux pour les banques, les fournisseurs de technologies et les régulateurs », conclut la professeure Yang. « Elle montre que la présence humaine dans la boucle n’est pas seulement une exigence de conformité : c’est un véritable levier stratégique. »